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[Fanfiction Nakama Yukie - Pour Daria] Gokusen Final Arena

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Message par denshaotoko Lun 31 Mar 2008 - 17:04

Ma toute première fanfiction, soyez indulgents, minna, ne? Je la dédie à Daria, notre Yankumi à nous, à plus d'un titre.
J'attends vos remarques/critiques/suggestions avec impatience. Je posterai cette longue nouvelle chapitre par chapitre, à intervalles très réguliers. Mon seul espoir est qu'elle amuse ou intéresse au moins l'un d'entre vous…



- 1 -

Au premier bleu elle n'avait rien dit. Ni au second. Ni même au troisième. Des bleus, à dix ans, on en ramène tout le temps et la devise de Kumiko, héritée de son grand-père, demeurait, par delà les années : livre tes propres batailles avec tes propres forces.
Mais, savait-elle aussi, certaines batailles ne peuvent se livrer sans aide. Et une mère, quelle qu'elle soit, ne peut voir son fils souffrir indéfiniment sans sourciller. Même si, comme elle, on préfère l'autonomie à l'ingérence. D'autant que les bleus étaient chaque soir plus gros, les vêtements plus abimés, les épaules de Satoru plus affaissées, comme si elles portaient un fardeau trop lourd pour elles. Ces signes-là, elle les connaissait bien : n'avait-elle pas vécu, dans son enfance, les mêmes tourments?
De sorte que soir-là était le dernier où elle laissait faire sans protester, sans questionner. Elle n'avait que trop tardé à réagir. Le regard de Satoru, ces derniers temps, se teintait plus souvent de reproche et de tristesse qu'à l'accoutumée, et elle n'avait pas su le voir, ou le comprendre. Il est difficile d'élever seule un enfant. Pas une nuit où cette pensée ne la tourmentât, peu avant qu'elle ne fût happée par un sommeil sans rêves. Pourtant elle n'avait pas eu le choix : soudain, en l'espace d'une année, hormis Satoru, tous ceux qu'elle aimait avaient brusquement disparu. Son grand-père d'abord, rattrapé par l'âge, lui qui jusqu'alors avait semblé inépuisable. Puis, sans que rien n'ait pu le laisser prévoir, l'homme qu'elle avait si tôt aimé, contre sa volonté aurait-elle dit, par surprise — elle la prof', lui son élève le plus rebelle — ; mais si totalement, jusqu'à l'abandon de soi, jusqu'à l'autel, jusqu'à l'offrande d'un enfant. Cet homme qu'elle chérissait tant, emporté en un mois par un cancer foudroyant.
N'était resté que Satoru, unique vestige de cet amour fulgurant et trop vite consumé.
"Qui t'a fait ça, Sa-chan?"
"Tu t'es battu, c'est ça? Ou on t'a battu?"
"Ce sont des enfants de ta classe? Des plus grands?"
Ce soir-là, elle n'allait pas le laisser filer sans avoir obtenu de réponse. L'enfant était assis en tailleur face à elle, de l'autre côté du kotatsu, les yeux obstinément baissés sur son bol de riz blanc. Elle avait attaqué en plein repas, par surprise, espérant une confession immédiate et spontanée — des pleurs aussi, peut-être, qui l'eûrent libéré du poids du secret.
Mais l'enfant se taisait, évitait son regard. Le portrait de son père…
"Ça ne peut pas durer comme ça… Qu'est-ce que ça va être, demain, hein? Un bras cassé? Une jambe?"
Malgré elle, la question suivante :
"Tu rends parfois des coups, toi, au moins?"
L'enfant, au moins, la considérait enfin avec attention. Comme malgré lui. La dévisageait, comme s'il ne reconnaissait pas la femme qui se trouvait devant lui. Sa mère, Sawada Kumiko, née Yamaguchi…
"Il n'est pas déshonorant de se battre à l'école, Satoru, si c'est pour te défendre ou défendre une cause que tu crois juste. Mais il n'y a aucun honneur à se battre avec la certitude d'être vaincu, tu comprends?"
Comme il pouvait ressembler à Shin à cet instant précis, et combien cette ressemblance — cette proximité — était douloureuse pour elle ! Ces lèvres serrées, comme pour retenir les mots; ces yeux soudain brillants de colère et pourtant résolument silencieux.
"Tu ne veux rien me dire?"
Un mouvement de tête, un seul. Non.
"Alors va te coucher, on n'a plus rien à se dire…"
Seule, ensuite, dans la salle à manger de leur petite maison, elle n'avait pu retenir ses larmes. Il est si facile de se croire forte lorsqu'on n'a rien à perdre. Toute sa vie elle s'était battue pour les autres — pour ses élèves, surtout, classe après classe. Mais cela, en définitive, ne lui avait coûté que des efforts, rien qui la touchât vraiment.
Demain, je vais voir de quoi il retourne…
La décision était prise, pour le meilleur ou pour le pire. Déjà, dans son esprit, elle organisait sa journée, préparait sa bataille. Demain…


Dernière édition par denshaotoko le Lun 31 Mar 2008 - 20:11, édité 1 fois
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Message par Milady Lun 31 Mar 2008 - 17:35

Aie ^^"

C'est un très bon début très Yankumiesque
Mais un croisement entre Nakama Yukie et Matsumuto Jun
Je crois que cela dépasse ma capacité d'imagination
Ou plutôt je ne veux pas l'imaginer XD

Petit blocage stupide ^^"
Mais sinon c'est un bon début
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Message par denshaotoko Lun 31 Mar 2008 - 18:30

Milady a écrit:Aie ^^"

C'est un très bon début très Yankumiesque
Mais un croisement entre Nakama Yukie et Matsumuto Jun
Je crois que cela dépasse ma capacité d'imagination
Ou plutôt je ne veux pas l'imaginer XD

Petit blocage stupide ^^"
Mais sinon c'est un bon début

Ah, mais là je me borne à respecter l'esprit de la série Smile Toutefois, connaissant tes sentiments envers cette chère Nakama Yukie, je comprends ton point de vue…
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Message par Milady Lun 31 Mar 2008 - 18:35

^^
Je sais pas :s
Dans l'esprit de la série même j'aurais jamais vu Yankumi épouser Shin
Cela ne cadre pas..................
MAis en fait je me demande si ce n'est pas moi qui :s

Parce que comme Jun est ma première idole
Et Nakama Yukie la première actrice que j'ai détestée
Tu imagines le mélange XD

=> Bon allez boulot!
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Message par Daria Mar 1 Avr 2008 - 22:54

J'ai eu l'immense honneur de la lire en primeur, merci à Densha pour la dédicace blush et bravo pour la qualité de cette fanfiction !

(euhhh Milachan, je lui ressemble pas tant que ça heinnnn :face: )
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Message par Milady Mar 1 Avr 2008 - 22:56

Ben si tu lui ressembles Dariachan XD
Je t'ai dit, j'aurais du te reconnaître pour cela ^^
Tu lui ressembles!
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Message par Daria Mar 1 Avr 2008 - 23:03

argh... mais...mais...mais...tu ne me détestes pas autant qu'elle hein ?! pale
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Message par Milady Mar 1 Avr 2008 - 23:07

Ben......si en fait je te l'avoue TT
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Message par Daria Mar 1 Avr 2008 - 23:11

mort (mais ça ne t'empêchera pas d'être esclavagisée !!)
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Message par Milady Mar 1 Avr 2008 - 23:12

Mais nooooooooooooooooooonnnn je t'aime Dariachan
j\'adore j\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adorej\'adore


Allez fin du HS
Sinon mami-sama ne sera pas nyappy!
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Message par Daria Mar 1 Avr 2008 - 23:16

Pour en revenir au sujet, j'espère que vous allez être nombreux à suivre la fiction de Densha, car en toute objectitivité, elle en vaut le coup... (et j'ai bien dit, en toute objectivité pour mon kurofuku ne ?)

(ahhh mais moi aussi Milachan, et ça n'a rien à voir avec tes délicieux chocolats Very Happy , mais j'ai bien noté pour les gâteaux à la JE quand même...!!)
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Message par Lynnha Mar 1 Avr 2008 - 23:49

O_O

*viens de capter qu'il y avait un autre fanfictionneur qui a débarqué dans la section*

double O_O

Demo... yeaahhh

J'adore !!!! Bon, comme fallait s'y attendre, c'est super bien écrit...
Mais c'est vrai que j'ai du mal à imaginer SAWADA Kumiko...
Ah ! Du coup j'ai envie de dessiner à quoi ressemblerait "un croisement entre Nakama Yukie et Matsumuto Jun" (dixit Mila-chan), avec un peu plus de ressemblance pour Jun ?

Mais... mais... c'est quand qu'elle vient la suite ? :s
Je veux voir Yankumi en action avec ses belles paroles !!!
"Laissez-vous guider par votre coeur"...

^^
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Message par Invité Mer 2 Avr 2008 - 5:54

bon ben la densha je suis sur le "bip"

en un mot : BRAVOOOOOOOOOOO !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!

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Message par denshaotoko Mer 2 Avr 2008 - 9:01

Vous êtes trop gentils, tous rouge Dans la mesure où je n'ai pas envie de vous faire lanterner tous, voici les deux chapitres suivants. Restez indulgents, hein? Mais soyez francs, aussi, faites vos critiques, dites ce qui ne va pas, etc… (à part que vous n'imaginez pas un croisement entre Yankumi et Sawada…)

- 2 -

Le principal du collège où allait Satoru était, de son propre aveu, un homme "paisible". Tout, du reste, attestait de la véracité de cette affirmation : son visage affable, son corps rebondi, son sourire avenant quoiqu'un tantinet trop onctueux.
"Pas de délinquants chez nous, Sawada-san !"
C'était au moins la quatrième fois qu'il l'affirmait, en tout cas.
"Nos enfants ne sont pas tous… exemplaires, bien évidemment, et certains font sans doute parfois montre d'indiscipline mais… violents, non, pas un seul ! Nous surveillons, vous comprenez?
— Comment expliquez-vous l'état de mon fils, alors? Chaque soir?
— Cela ne doit pas se passer ici, on ne m'a jamais rapporté le moindre incident… Votre enfant prend le car, non, pour rentrer chez vous? Peut-être que…"
Que pouvait-elle répondre? De Satoru, le matin, avant qu'il ne parte, elle n'avait pas plus que la veille obtenu la moindre information.
"Bien entendu, continuait le principal, maintenant que vous m'avez signalé le problème, nous allons être vigilants, mais…"
Mais… Son ton indiquait clairement qu'il ne croyait pas un mot de ce qu'elle lui racontait. Ce qui la faisait bouillir intérieurement. L'aveuglement volontaire des "autorités". La peur des vagues, oui…
D'un geste paternel, l'homme la raccompagnait déjà, la saluait d'un signe de tête à la fois déférent et — du moins le percevait-elle ainsi — légèrement ironique.
Ce n'est qu'une fois franchies les grilles du collège qu'enfin elle se ressaisit et, intérieurement, poussa un hurlement de rage. Comment avait-elle pu laisser passer l'occasion? A ce moment, un garçon qui passait la bouscula violemment.
"Eh!, s'écria-t-elle.
Le garçon se tourna vers elle, hostile, les yeux pleins de mépris. Avec lui, telle une meute autour de son chef, une dizaine de gamins du même âge avec le même regard haineux et vaguement désenchanté.
"Tu me cherches, baba?"
Les narines de Kumiko se gonflèrent de rage, cependant qu'autour d'elle la bande se rapprochait, se regroupait, encourageant leur chef de "Vas-y, Masa-kun, rentre-lui dans le lard!"
"Qui c'est qu't'appelles "Baba", p'tit con?", hurla-t-elle en saisissant le chenapan par le col de son uniforme.
Le ton surtout, ainsi que le vocabulaire, figèrent un instant l'enfant. Puis Kumiko sentit une douleur violente dans le dos : par derrière, l'un des gamins de la bande venait de lui assener un coup de cartable.
"Laisse-le, kusobaba, t'es pas de taille !"
De surprise, elle laissa échapper celui qu'elle tenait. L'instant d'après, toute la bande avait disparu, comme avalée par la rue.
"Qu'est-ce qui se passe, ici?", entendit-elle vitupérer juste derrière elle.
Un homme, puis un autre, jaillissaient du collège, véhéments, prêts à en découdre.
"Que faites-vous ici, Madame? Qu'est-ce que vous voulez à ces enfants? Nous allons appeler la police si vous ne partez pas !
— Appelez-la, oui!, répliqua Kumiko en les foudroyant du regard tout en tentant de reprendre son souffle. Je leur expliquerai ce que ces gamins…"
Mais évidemment, se souvint-elle avec amertume, elle ne pouvait pas faire ça : sa famille, son nom, tout cela jouait contre elle, comme toujours… A regret, elle secoua la tête et, résignée, prit le chemin de la maison…

- 3 -

Un nom, c'était tout ce qu'il lui fallait. Avec cela, elle trouverait la famille, verrait les parents, expliquerait, tenterait de raisonner. Mais elle n'avait qu'un prénom, "Masa", peut-être même un simple diminutif… Masahiro, Masayuki, comment savoir?
Pas un instant elle n'avait songé que la source des tourments de Satoru pût se trouver ailleurs. Son expérience combinée d'enseignante et de ex-future chef de clan lui avait appris qu'il existait peu de lieux où deux bandes armées pouvaient cohabiter. Et que, lorsque c'était le cas, leurs agissements ne restaient guère longtemps dans l'ombre, tant était forte la tentation de s'affronter au grand jour. Or, soit le Principal mentait comme un arracheur de dents pour préserver la réputation de son collège (mais cela, songeait-elle, eût été quand même perilleux…), soit il n'avait effectivement pas connaissance de méfaits au sein de son collège.
Donc la bande de galopins qu'elle avait rencontrée la veille régnait bel et bien sur l'école, en toute impunité car en sourdine, de façon à la fois sournoise et parfaitement contrôlée.
Le lendemain, elle retourna au collège en fin de journée, à l'heure de la sortie des classes, afin de ramener Satoru. Elle avait pris le tandem un peu brimbalant acheté l'année précédente au vide-grenier de l'école primaire de son quartier. Elle s'était dit qu'ainsi elle pourrait aller de temps à autre se promener dans la campagne avec son fils. Jusqu'alors, pourtant, elle n'avait guère trouvé le temps de le faire, accaparée comme elle l'était par son travail au lycée voisin.
A peine le carillon avait-il sonné que la rue s'emplit d'enfants en uniforme, cependant que les cars scolaires arrivaient et se garaient, leurs portes déjà ouvertes. Kumiko descendit du tandem et alla à la rencontre de son fils. Celui-ci — le coeur de la jeune femme se serra aussitôt — parlait justement avec le garçon de la veille. Ou plutôt celui-ci parlait d'un air décidé et Satoru écoutait, les yeux baissés.
"Comme on se retrouve !", lança Kumiko en arrivant à leur hauteur.
"Masa" la dévisagea avec répugnance :
"Encore toi, baba?"
Puis, à Satoru :
"Ta mère? T'es verni, toi !"
Avant que Kumiko ait pu dire ou faire quoi que ce soit, le garçon s'évapora au milieu de la foule des autres collégiens, non sans avoir lancé, avant de disparaître, un "Souviens-toi de ce que je t'ai dit" qui glaça le sang de la jeune femme.
"De quoi dois-tu te souvenir?, demanda-t-elle à son fils.
— De rien.
— Allez, on rentre…"
L'instant d'après, tandis que Satoru s'installait derrière elle sur le tandem et, tant bien que mal, ajustait à sa tête le casque trop grand pour lui, Kumiko aperçut au loin le dénommé "Masa" qui montait dans une impressionnante voiture noire. Laquelle démarra en trombe — indifférente aux enfants qu'elle mettait en danger — et, faisant demi-tour dans un crissement de pneus qui lui fit serrer les dents, passa à côté d'eux à toute vitesse avant de disparaître au coin de la rue. Kumiko la regarda s'éloigner d'un air pensif, tout en songeant qu'il y avait peut-être, du coup quelque chose à faire…
Ce n'était pas, se morigénait-elle malgré tout en saisissant un peu plus tard son mobile, la chose la plus intelligente que l'on pouvait imaginer, mais elle n'avait pas le choix. La situation étant ce qu'elle était, aucune autre solution ne lui venait à l'esprit. Tandis que Satoru grignotait son goûter devant la télévision allumée, Kumiko prit une longue inspiration et, presque à regret, appuya longuement sur le "1" du petit téléphone.
Deux sonneries (dont elle imaginait l'écho dans l'immense demeure, voyageant de pièce en pièce, à la recherche de son correspondant), puis une voix familière, rauque, peu avenante et pourtant si agréable à ses oreilles qu'elle eut soudain envie de pleurer.
"Wakamatsu…, murmura-t-elle.
— Ojô!"
Toute la surprise du monde dans cette exclamation. La joie aussi, sans doute, mais elle s'interdit aussitôt d'y penser.
"Ojô, vous allez bien? Le petit? Qu'est-ce qu'il y a?"
Immédiatement, droit au but comme toujours. Pourquoi eût-elle appelé, sinon?
"Je vais bien, rassure-toi… Et vous autres, les gars? L'oyabun?"
Elle ne voulait pas prononcer le prénom de celui qui, à cause d'elle — de sa défection, de sa trahison pourrait-on dire — avait pris la tête du clan Yamaguchi : son oncle Yasuhiro, le frère de sa mère. Yasuhiro, déjà oyabun de la branche d'Ôsaka et qui, désormais, assumait le contrôle de tout le clan…
"Ah, il va bien… Il est chez lui en ce moment, vous savez ce que c'est…
— Donc c'est toi le chef, eh?
— Ma foi…"
Elle ne put retenir un petit rire de gorge, tant elle se représentait parfaitement son fidèle Wakamatsu en train de se gratter la nuque, gêné par l'honneur que constituait cette tâche.
"J'ai un service à te demander…, reprit-elle.
— Tout ce que vous voulez, Ojô!
— Je vais te donner un numéro d'immatriculation et…
— J'ai compris, Ojô, vous faites pas de bile! Je mets Tetsu et Minoru sur le coup!
— Merci, Wakamatsu…
— Non, non, pas de merci, Ojô!"
Elle donna le numéro de la plaque minéralogique et raccrocha aussitôt, avant que la nostalgie ne l'emporte sur la sagesse et que les larmes — de dépit, de regret — qu'elle sentait monter en elle ne la submergent.
Puis elle alla chercher dans son bureau les copies qu'elle devait noter pour le lendemain et rejoignit Satoru. Lequel, absorbé par son dessin animé, ne lui accorda pas la moindre attention…
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Message par Daria Mer 16 Avr 2008 - 13:34

Et la suite, Densha ? Very Happy
Bon sang, je vais finir par croire que tu m'as déjà observée à la sortie de l'école... (ou alors, toutes les mères sont les mêmes)
Par contre, j'ai pour le moment évité le tandem.
Lynnha, tu peux poster quand tu veux l'image que tu te fais du croisement de Nakama Yukie et Matsumoto Jun, c'est une bonne idée de "réaction" à la nouvelle de Densha, je trouve !
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Message par denshaotoko Sam 19 Avr 2008 - 12:12

Voici la suite demandée…

- 4 -

Les vieux réflexes — surtout ceux acquis "à la dure" — ne meurent jamais, quoi qu'on fasse. Le chuintement léger d'une porte qui coulisse et qu'on referme avec précaution, les pas lents, si lents, sur l'antique parquet de l'étage… Aucun son violent, pas de "bruit" à proprement parler, et pourtant Kumiko se réveilla aussitôt, tous ses sens en alerte. Satoru… Elle repoussa la couette légère qui la couvrait, se leva vivement. Se dirigea vers la porte de la chambre, silencieuse comme une chatte…
Elle aurait pu croire avoir rêvé tant, à nouveau, la maison était paisible. Un frisson, pourtant, la saisit, comme un vague pressentiment. Elle descendit l'escalier en prenant de n'en faire craquer aucune marche, se dirigea vers la cuisine où, malgré l'heure tardive — 3h30, avait-elle eu le temps de voir sur son réveil — une lumière brûlait. Satoru…, pensa-t-elle à nouveau. A moins qu'un cambrioleur…? Elle se rappelait avoir fermé portes et fenêtres correctement, la veille, mais… D'instinct, ses poings se serrèrent, prêts au combat. La batte de base-ball de son fils traînait à la lisière du genkan, elle s'en saisit en silence tout en continuant à avancer.
Rien, cependant, n'aurait pu davantage la surprendre que ce qu'elle vit en entrant dans la cuisine éclairée : Satoru, en pyjama, monté sur un tabouret, avec dans les mains le "bocal au trésor" comme tous deux l'appelaient — la cagnotte des courses, toute la monnaie qu'on a la flemme de ranger et qu'on jette là, en attendant.
"Qu'est-ce que tu fais?", dit Kumiko, la voix aussi douce que possible.
L'enfant poussa un hurlement et lâcha le bocal. Comme dans un film, Kumiko le vit tomber et se briser en mille éclats lumineux sur le dallage, dans un fracas assourdissant…
Peu après, alors que Satoru et elle avaient pris place chacun de leur côté du kotatsu, Kumiko tentait d'organiser ses pensées le plus calmement possible. Ne pas hurler, parler; ne pas exiger, juste demander. Respirer lentement. Combien il eût été plus facile de franchir le peu de distance qui les séparait et de secouer l'enfant jusqu'à ce qu'il avoue ! Mais ensuite?
"Qui t'a demandé de faire ça?"
"Pourquoi avais-tu besoin de cet argent?"
"C'est la première fois que tu fais ça, ou bien…?"
L'enfant, face à l'interrogatoire, demeurait muet, la tête inclinée, si fragile dans son pyjama trop grand pour lui que Kumiko avait envie de pleurer. Comment avons-nous pu en arriver là?
"Tu peux parler à Maman, tu sais… Tu crois que je ne peux pas t'aider? J'aide des gens tous les jours, tu sais?, c'est mon métier, enfin : une partie de mon métier, et…
— Tes élèves !"
Soudain le regard de Satoru, brûlant, insoutenable de colère.
"Tu as plus de temps pour eux que pour moi ! Tu n'as jamais de temps pour moi, désormais !"
C'était si… injuste, si faux, qu'elle ne savait plus quoi ajouter, sinon : "Ce n'est pas le problème, n'est-ce pas?. Nous sommes en train de parler de…"
Mais il était déjà trop tard : sitôt allumée, la flamme de la rebellion s'était mouchée d'elle-même et l'enfant avait repris la contemplation de ses ongles.
"Pour cet argent, reprit Kumiko, je veux savoir, tu entends? Tu dois me dire…"
Silence obstiné, impossible à briser. Kumiko avisa la pendule perchée sur le vaissellier : quatre heures moins le quart.
"Retourne au lit, on en reparlera demain, tu peux en être sûr!"
L'enfant s'enfuit comme s'il avait des chiens aux trousses…


- 5 -

Après cela, Kumiko n'avait pas retrouvé le sommeil et la journée du lendemain n'avait été que fatigue et doutes. Tandis qu'elle enseignait — tentant de réprimer ses baîllements —, à la pause-déjeuner, sur le toît du lycée avec ses collègues, l'après-midi enfin alors qu'elle n'en pouvait plus d'attendre le carillon libérateur, elle n'avait fait que réfléchir à la suite à donner aux événements de la nuit. Ce qui se passait avait un nom, et ce nom était laid. Vol, oui, si l'on considérait le côté "Satoru", mais ce n'était pas ce mot-là qu'elle avait à l'esprit. Le larcin empêché — ou peut-être pas car elle n'avait pas vérifié, le matin, si son fils n'avait pas quand même pris l'argent — n'était qu'un symptôme, celui d'un mal plus sérieux qu'il fallait traiter au plus vite.
En fin de journée, alors qu'elle passait les grilles du lycée, elle attrapa à la volée un taxi en maraude. Entre deux cours, elle avait pris ses renseignements et savait exactement où aller. Wakamatsu n'avait pas appelé mais elle ne pouvait pas attendre.
L'adresse qu'elle avait donnée au chauffeur, elle s'en rendit compte comme le taxi quittait la ville et pénétrait dans la forêt voisine, était plus éloignée qu'elle ne le pensait et, un instant, elle regretta son geste. Puis, inopinément, alors que les arbres s'éclaircissaient et que les champs réapparaissaient, la voiture quitta la route goudronnée et s'engagea sur un étroit chemin de terre. Bientôt, elle pénétra dans un village qui semblait dépourvu d'habitants, le traversa de part en part pour s'arrêter finalement le long d'un mur gris qui, visiblement, ceignait une demeure gigantesque. Kimiko paya, sortit de la voiture — laquelle redémarra aussitôt, ne lui laissant, pour le coup, aucune chance de revenir en arrière — et se dirigea vers la double porte de bois sombre qui faisait office d'entrée, quelques mètres plus loin.
La plaque, au-dessus de la sonnette, disait : "Maison Kurobayashi". Kimiko prit une goulée d'air et appuya sur le petit bouton blanc. La porte s'entrouvrit bientôt : deux hommes, vêtus de costumes noirs, un maigre et un gros, l'air peu engageant.
"Vous voulez?
— Je m'appelle Sawada. Le fils de Monsieur Kurobayashi est dans la même école que mon fils et…
— Et alors?
— J'aurais voulu rencontrer Monsieur Kurobayashi, si c'était…"
Le plus gros secoua la tête en faisant la moue.
"Sur rendez-vous uniquement!"
Kumiko s'apprêtait à faire un pas vers eux lorsque, brusquement, le plus maigre s'avança lui-même vers elle.
"Dégagez!", fit-il, avant de cracher sur le sol.
Le déclic se fit alors dans l'esprit de la jeune femme. Seraient-ce…? Si loin de la capitale, ou de toute autre grande ville… Pourtant les signes ne trompaient pas, maintenant que son attention était attirée dessus : les armes qui gonflaient la poche intérieure de leurs vestes, les bijoux coûteux qui ornaient leurs poignets et leurs cous…
"Toi, tu dégages!", lança-t-elle.
Tout en prononçant ces mots, elle saisit le bras de l'homme et le tordit violemment. Un crac peu encourageant se fit entendre et le sbire hurla. L'autre s'était déjà approché, la main soudain prête à dégainer, mais, voyant le regard de Kimiko, il stoppa net.
"Tu vas faire quoi, toi? Sortir ton feu et me buter en pleine rue? C'est ça, ta conception de ton travail? Attirer le déshonneur sur la famille et les affaires de ton patron?"
Elle lâcha le maigre, qui s'affala sur le sol, en larmes.
"Conduis-moi à lui. Maintenant."
Sans attendre la réponse, elle bouscula l'homme qui demeurait pétrifié et pénétra dans la cour de la demeure des Kurobayashi.
Aussitôt — tandis que, derrière elle, déjà, la porte se refermait — elle se sentit en terrain de connaissance. Ce décor paisible, ce jardin artistiquement agencé, ces gizô impénétrables éparpillés le long de l'allée de graviers qui menaient à l'antique maison traditionnelle, tout cela lui était familier. Tout autant que l'étaient les deux nouveaux hommes en noir qui, l'air encore moins engageant, jaillissaient de l'intérieur et se hâtaient vers elle, comme prévenus par magie de son intrusion.
"L'oyabun, énonça-t-elle. Sur le champ. C'est à propos de son fils."
Les derniers mots étaient spécialement destinés à faire réfléchir les sbires : s'il s'agissait d'une affaire de famille, ils ne pouvaient qu'hésiter à recourir à des extrémités… fâcheuses et consulteraient leur chef à la place.
Du reste, ils n'eurent pas à le faire : alors que l'un d'eux s'apprêtait à tourner les talons, un nouvel arrivant descendit les quelques marches du perron : quarante-cinq ans, bel homme quoique grisonnant et les lèvres fines comme des lames.
"Que voulez-vous? Pourquoi venez-vous chez moi?
— Je m'appelle Sawada et je viens au sujet de votre fils…"
Le regard de l'homme se durcit.
"Qu'a-t-il fait encore?"
Kumiko décida de ne pas tergiverser.
"Je le soupçonne de racketter les autres enfants du collège… dont mon fils, Satoru"
L'homme haussa les sourcils, comme abasourdi.
"Mon… fils? Racketter des…? C'est ridicule!
— Il n'y a pas d'erreur possible, je…"
Soudain, l'homme souriait, visiblement soulagé.
"Entrez, chère Madame, nous allons boire un thé ensemble et régler cette histoire!"
Comme Kumiko allait le suivre, son portable se mit soudain à vibrer dans sa poche.
"Juste un instant !", fit-elle.
Elle décrocha : c'était Wakamatsu.
"Dans quoi vous vous êtes fourrée, Ojô? Vous savez à qui est la voiture dont vous…?
— Je commence à m'en douter…, répliqua-t-elle d'une voix mesurée, sentant le regard inquisiteur de l'autre.
— Cet homme est un…
— Je n'ai pas le temps, là, envoie-moi les détails par mail… Et ne t'inquiète pas."
Elle coupa la communication sans laisser à Wakamatsu le temps de répliquer — qu'aurait-il pu dire qui pût la dissuader de continuer? De toute façon, à voir ces hommes armés protégeant cet homme sûr de lui et trop bien habillé, le doute n'était pas permis : elle se trouvait chez un yakuza, et des plus dangereux…
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Message par Invité Dim 18 Mai 2008 - 21:57

vivement la suite densha ! j\'adore

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Message par denshaotoko Dim 18 Mai 2008 - 22:14

Pas de problème Smile

- 6 -

"Je vous en prie, racontez-moi votre histoire…"
Kumiko prit une longue inspiration avant de commencer. En tailleur face à Kurobayashi, sa tasse de thé fumant posée devant elle, elle se sentait comme une petite fille convoquée dans le bureau de son père. Ressaisis-toi, se morigéna-t-elle. Des gars comme lui, tu en as cotoyé toute ta vie…! Elle aurait pu rajouter Hélas! mais cela n'aurait pas été juste. Après tout, elle était — par hasard, mais n'est-ce pas le cas de toute naissance ? — née dans ce milieu, au sein d'une famille plus respectée que respectable.
Sans fioritures, elle débita son récit, commençant par les bleus de Satoru, puis l'argent qu'il avait essayé de voler. Ce n'est que lorsqu'elle évoqua le prénom de l'enfant qu'elle soupçonnait être à l'origine de tout cela — et qui se faisait appeler "Masa" — que l'homme réagit.
Et ce avec une violence qui prit Kumiko par surprise.
"Masa? Vous avez dit "Masa"? Mais c'est impossible!"
Soudain, l'homme était debout, il avait fait le tour de la petite table sans qu'elle l'eût vu bouger, et ses mains la saisissaient par son vêtement pour la forcer à se lever.
"Vous inventez ce nom!
— Je n'invente rien!"
Répliqua-t-elle tout en lançant son pied aussi fort qu'elle pouvait. L'homme hurla — touché à l'aine — et la lâcha, cependant que les fusuma du grand salon japonais s'ouvraient à la volée et qu'une dizaine d'hommes armés faisaient irruption. Kumiko se mit en garde, soudain prête à en découdre, les yeux brillants de colère.
"Ne bougez pas!", cria Kurobayashi.
Les sbires se figèrent net.
"Ne bougez pas, je m'en occupe…"
L'homme se relevait, s'approchait de Kumiko, pâle de rage contenue.
"Je pensais, tout à l'heure, que vous parliez de mon fils aîné, Hiroyuki…
— Quel âge a-t-il? L'enfant dont je vous parle a douze, treize ans… Et je l'ai vu monter dans votre voiture…"
Soudain, le visage de Kurobayashi se teinta de doute.
"Ma voiture…? Je viens de rentrer, j'étais parti… Pour affaires… Je suis souvent absent…"
Son regard — bleu-gris, intense — frappa Kumiko comme un coup de poing : le regard d'un père, brusquement inquiet. Un regard qu'elle n'avait vu chez personne depuis si longtemps!
"Mon fils cadet se prénomme Masanobu"
Machinalement, il traçait du doigt les deux kanji : "droit" et "vrai".
"Ses camarades l'appellent Masa", émit Kumiko.
Hochement de tête presque imperceptible — aveu involontaire, pour ainsi dire de capitulation.
"Cela n'a pas de sens…, fit l'homme en se rasseyant soudain. Pourquoi…? Il n'a pas besoin du moindre argent, je lui donne tout ce qu'il peut vouloir…
— Il y a des milliers de raisons, déclara Kumiko. Ne serait-ce que pour se valoriser… Ou pour vous ressembler?
— J'ai toujours voulu tenir mes enfants à l'écart, l'aîné comme le cadet… A l'écart des "affaires", de ce monde-là…"
Kumiko poussa un soupir : elle était bien placée pour savoir qu'une telle chose était impossible.
"Je ne vous demande qu'une chose, M. Kurobayashi… Que vous surveilliez votre fils, afin de savoir de quoi il retourne vraiment… Ni vous ni moi ne voulons que…"
Elle avait voulu dire : "la police", mais se ravisa :
"…que des étrangers interviennent dans cette affaire…"
Nouveau hochement de tête. Puis, comme s'il se ressaisissait, l'homme se mit debout et se planta devant Kumiko, les yeux brûlants de détermination :
"Je vous ai parfaitement comprise, Madame… Mais maintenant écoutez-moi, vous aussi : je règlerai ce côté de l'"affaire", comme vous dites, à ma façon, est-ce clair? Ne vous approchez pas de mon fils!
— Je laisserai votre fils en paix s'il laisse le mien…"
Sur ce, elle tourna les talons et se dirigea vers la porte.
Au moment, de sortir, toutefois, elle se retourna une dernière fois :
"Qui va parfois le chercher à l'école, alors, si ce n'est pas vous?
— Mon bras droit", répliqua Kurobayashi.
Cela se tenait : qui donc allait la chercher elle à l'école quand le vieux Ryuichiro était absent, sinon le fidèle Wakamatsu?
"Demandez-lui, alors, comment il se fait que votre fils a l'opportunité de se livrer à ces petits jeux…!
— Fichez le camp !", hurla l'homme tandis que ses sbires poussaient déjà Kumiko vers le jardin, puis hors de la propriété.
Les portes refermées, Kumiko se laissa aller à sourire — le sourire désabusé, presque las, de qui vient de remporter une victoire insignifiante…
L'étape suivante, malgré tout, était facile à mettre en œuvre et Kumiko s'y employa dès le lendemain : trouver — que le père du garçon le veuille ou non — à quoi pouvait servir l'argent que récoltait "Masa" en rackettant les plus petits. A la sortie de l'école, cet après-midi-là, elle se fit invisible mais vigilante, à l'affût. Satoru, bientôt, passa les grilles en compagnie de deux de ses camarades, et, comme Kumiko s'y attendait, fut rapidement rejoint par "Masa" et sa bande. Tandis que Satoru expliquait visiblement qu'il n'avait pu trouver l'argent demandé et qu'il se faisait, de ce fait, insulter avec véhémence, Kumiko se retint à grand peine d'intervenir. Mais elle n'avait pas le choix… Puis, la bande de "Masa" s'égaya soudain, laissant Satoru attraper de justesse son bus… Kumiko quitta alors sa cachette et, le plus discrètement possible, se mit à suivre la bande d'enfants.



- 7 -

Après cinq minutes, Kumiko fut tentée de rebrousser chemin. Tout cela n'avait pas de sens, encore moins d'utilité. La bande d'enfants, conduite par un "Masa" aux traits tendus et décidés, avait commencé par emprunter les rues étroites et désertes du bas de la ville, des rues dont Kimiko n'aurait jamais soupçonné l'existence — maisons traditionnelles aux toits bas et peu inclinés, ça et là un petit autel, hommage à Inari ou Amaterasu —, puis avait passé un des ponts de bois rouge qui enjambent la rivière et, après une poignée d'autres ruelles, avait débouché (par une sorte d'anfractuosité celée entre deux boutiques) dans la grande artère commerçante de la ville, grouillante de vie. Tout à coup, ce n'était que bruit et activité : le poissonnier et la vendeuse de légumes s'interpellaient avec bonne humeur, un policier à vélo se frayait un passage dans la foule à grand renfort de coups de sonnette, mille femmes au foyer faisaient leurs achats du jour, l'air concentré… Que diable ces enfants étaient-ils venus faire en ce lieu?
Mais hormis quelques "pauses vandalisme" qui donnèrent envie à Kumiko de les attraper par le revers du paletot et de leur faire cracher leurs dents (ici un coup de pied dans un cageot de pommes, là une affichette arrachée à la devanture d'un coiffeur), la bande semblait vouloir poursuivre sa route. Bientôt, les magasins furent derrière eux et ce fut à nouveau une poursuite silencieuse, vers le haut de la ville.
Parvenu au grand torii qui marquait le début du chemin vers Tenbô-ji, le temple shinto de la ville, les gamins s'arrêtèrent et s'assirent, comme soulagés, sur la seconde marche de l'immense escalier qui, eût-on dit, s'élevait jusqu'au ciel. Kumiko n'eut d'autre choix que de demeurer loin d'eux, à un coin de rue, et de les surveiller de loin.
Elle n'eut pas longtemps à attendre : déjà, un bruit assourdissant se faisait entendre, celui d'une volée de motos aux pots trafiqués. Bientôt, le bruit se mua en poussière et, si vite qu'on les eût cru jaillis de cette poussière, apparurent quatre lycéens sur quatre engins flambants neufs. Aussitôt, "Masa" se mit debout et, tandis que celui qui semblait être le leader des quatre descendait de sa moto et, lentement, ôtait son casque, il s'approcha et sans un mot lui tendit une enveloppe brune plutôt rebondie. L'argent…, pensa Kumiko. Puis : Je dois m'approcher si je veux entendre ce qu'ils se disent… Mais comment faire sans se faire repérer? Indifférent à son dilemme, le leader passait la main dans les cheveux du gamin avec désinvolture, en guise de remerciement. Regardant mieux, Kumiko poussa un petit cri de surprise : ces lycéens, elle les connaissait, ils fréquentaient Shirokin Kôkô où elle-même enseignait. Avec application, elle grava dans son esprit les quatre visages familiers mais anonymes, avec la ferme intention de mettre un nom dessus dès que l'occasion se présenterait.
Aussi vite qu'ils étaient arrivés, les lycéens firent repartir leurs moteurs et, bientôt, dans un vacarme insoutenable, disparurent comme par magie. Alors la bande des gamins s'égaya elle aussi, après quelques au revoir rapides, et "Masa" demeura seul près du torii. Kumiko se demanda ce qu'il allait faire après, comment notamment il comptait rentrer chez lui. Mais c'était s'inquiéter pour rien : l'instant suivant, l'enfant sortait son mobile et, quelques minutes plus tard, la même voiture noire gigantesque que l'autre jour, devant l'école, vint s'arrêter juste devant lui. La porte arrière s'ouvrit et le gamin s'engouffra à l'intérieur. Une seconde, et la voiture repartit.
Kumiko poussa un long soupir. Cette scène à laquelle elle venait d'assister avait un sens qui, pour l'instant, lui échappait. Qui étaient ces lycéens? Une "bande", assurément; des "durs", comme elle aimait les appeler. Du genre de ceux auxquels elle avait eu maintes fois affaire, à Tôkyô puis, plus tard, au gré des postes, un peu partout dans tout l'archipel. Comparativement, les élèves qu'elle avait cette année-là étaient plutôt calmes. Normaux, pour une fois. Des garçons et des filles comme on en rencontre des millions au Japon : sans talent particulier, sans goût véritable pour l'école ni du reste pour l'effort, mais pas méchants, juste… indifférents. Contre cela aussi, elle avait l'habitude de lutter, quoiqu'avec plus de difficulté.
Ces quatre-là, songeait-elle, n'étaient sans doute pas plus "mauvais" que les autres, juste un peu plus rebelles, moins enclins à se laisser engloutir dans la machine éducative qu'était le lycée. Kumiko se rappelait vaguement les avoir vus plusieurs fois à la sortie du lycée mais, curieusement, jamais à l'intérieur. Mais pourquoi s'en prendre à des collégiens? Si "s'en prendre" était, du reste, le terme approprié : Kumiko n'avait senti aucune contrainte, aucune violence dans la scène dont elle avait été témoin. Alors quoi?
De retour chez elle — où Satoru l'attendait avec indifférence devant la télé allumée, un verre de lait posé devant lui —, elle prépara le repas du soir avant de consulter son courrier électronique où, comme prévu, l'attendait le "rapport" de Wakamatsu.
Lequel était plutôt alarmant : Kurobayashi Noriyasu y était décrit comme le "parrain" de toute la pègre de la région. Son terrain d'action était aussi grand géographiquement que du point de vue de la diversité des "activités", puisque celles-ci englobaient le jeu, la prostitution, la drogue, le prêt sur gages — avec extorsion de fonds si nécessaire —, ainsi que, récemment, le trafic d'oeuvres d'art. Sur le plan personnel, le mémo de Wakamatsu mentionnait simplement l'existence de ses deux fils, Hiroyuki, 17 ans, et Masanobu, 13 ans, ainsi que le fait qu'il avait perdu son épouse trois ans plus tôt dans des circonstances "non précisées".
Tel était donc l'homme auquel, indirectement, elle s'attaquait. Connais ton ennemi comme toi-même…, se dit-elle avec un brin d'ironie. Cela n'était guère difficile, vu ce qu'elle était (ou avait été). A la force, il fallait opposer la force, ainsi que la détermination.
Et puis… certainement aussi fallait-il jouer la corde de la relation père-enfant. Car l'homme, tout oyabun qu'il était, était également un père.
Tandis qu'elle réfléchissait intensément à la marche à suivre, Satoru regardait l'écran de télévision, son verre de lait désormais vide à côté de lui. De nouveaux bleus ornaient son visage impassible, sur lesquels Kumiko ne poserait aucune question.
A tort…
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Message par Invité Dim 18 Mai 2008 - 22:17

ca c'est du rapide densha !!!!!!!!!!!!!!!!!!
je lis de suite

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Message par denshaotoko Dim 18 Mai 2008 - 23:50

Merci pour ta gentillesse, Komujy Smile
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